Qu’en reste-t-il?

En 2015, notre pays subit un choc, la mort d’artistes et de journalistes, libres, rebelles et farouchement indépendants. J’ai ressenti de la tristesse et de l’impuissance devant tant de violence contre la liberté de dire, de créer et d’exposer son opinion. Cette période amorce aussi un état d’urgence permanent plongeant notre pays dans un climat de peur, de défiance, d’actions coercitives. Privation de liberté et de clarté, pour le bien de tous … à ce que l’on dit.

En 2021, que reste-t-il de la liberté d’opinion, de la défense de ce bien précieux? Peu de choses je le crains… Ce ne sont plus uniquement les coups de tueurs fanatiques qui menacent la presse mais la facilité, le silence complice, la propagande, la corruption et la censure. Où sont les êtres libres, les découvreurs, les rebelles, les farouches? La presse est-elle encore vivante ou bien est-ce l’ombre d’une profession qui s’agite devant nos yeux, un faire valoir à paillettes ?

L’homme aux parapluies

L’homme aux parapluies s’en est allé.
Longtemps à nos côtés,
L’artiste s’est fait discret,
Patiemment, il nous protégeait de l’ondée.

Mais le virtuose n’est plus.

A bout de bras et avec sourire
Il tendait vers le ciel une forêt de tissus
Des colonnes, arcs et chapiteaux de fêtes
Tout au-dessus de nos têtes.

Avant que la bêtise…
Avant que la couardise …
D’une foule somnambule ne foulent le juste,
Et ne cachent le soleil terrien.

Peut-être les parapluies et l’homme reviendront.
Peut-être…

Si la chaleur de notre cœur fait fondre la peur.

Les vertes pousses

Invisible aux regards se cache un jardin.

Sauvage et bruyant, il accueille mille formes de vie. Mais les vents brûlants enfoncent aujourd’hui sa bordure. Le feu consume ses habitants, paralysés par la menace.

Le bois se fend sous les crocs des ravageurs. Le silence gagne.

Ce jardin est le refuge des Humains.
Il mérite soin et attention, tout le courage et la persévérance du cœur,

Pour que renaissent un jour les vertes pousses.

Libération

Il a fallu attendre mes 50 ans, la crise pandémique et ses errements sécuritaires pour franchir le cap et parler en mon nom.

Je fais ce pas de côté en créant une première page web. C’est un acte important qui m’expose. Par ce biais, je partage mes pensées et mes dessins avec maladresse certainement mais avec sincérité assurément. C’est aujourd’hui le seul moyen public d’exprimer ma sidération, mes questionnements et mon écœurement face au poison de la discorde qui gangrène notre société. Mon action si modeste ne va pas stopper la désagrégation des droits ou la brutalité des actes politiques mais elle a le mérite de transmuer en création ma colère et mon impuissance de citoyen.

Quel a été l’élément déclencheur de cette démarche ? Le discours présidentiel du 12 juillet 2021 et la nouvelle Bastille qui s’élève entre nous. Par mes mots et mes dessins, je souhaite ronger les murs de la pensée stérile et garder une cohérence entre mes valeurs et mes actes.

Je ne participerai pas en tant qu’acteur ni spectateur aux mesures liberticides qui se dessinent en fin d’année. Dois-je faire confiance à l’élan citoyen pour reconquérir notre liberté, cette vertu humaine si fragile qui arme durablement l’esprit de patience et d’espoir? Cette liberté ne s’obtiendra que par la juste mesure, la persévérance et le courage, en refusant de céder à la peur, aux menaces ou au chantage. Œuvrons tous pour le retour à l’entièreté de nos valeurs d’égalité, notre dignité et notre droit à disposer de notre corps en tant qu’humain libre et sain d’esprit.

La vérité et la liberté portent par elles leurs évidences, il faut seulement que l’esprit soit préparé à les recevoir.